« Marche avec nous Jésus ressuscité… »

 « Roule avec nous Jésus ressuscité… »

« Le hasard, c’est peut-être Dieu qui se promène incognito »  Albert Einstein

« Or, tandis qu’ils parlaient et discutaient,
          Jésus lui-même s’approcha d’eux, et il marchait avec eux.
                    Mais leurs yeux étaient aveuglés,
                              Et ils ne le reconnaissaient pas » Luc 24,15-16

« Notre cœur n’était-il pas tout brulant, tandis qu’il nous parlait sur la route… » Luc 24,32

« La vie religieuse en conversation… »  AG CORREF

Ces petites phrases accompagnent mes chemins, marqués souvent de rencontres « éphémères » qui nourrissent ma vie d’humanité !

Les transports :

Il faut aller et revenir de la gare… et selon les heures, il n’y a pas de bus !!

C’est déjà ces petits bouts de conversation avec ceux et celles qui m’emmènent à la gare de bonne heure… où viennent me chercher tard :

– c’est Alain venu une fois à 4h du matin… avec qui je peux parler en tête à tête  de sa vie de couple, des tensions vécus dans son travail… de son équipe en mouvement…

– c’est Mireille, toujours prête à parer aux coups durs : me récupérer à la gare lors de ma chute, m’emmener aux urgences, trouver la pharmacie de garde à minuit grâce à son ancien travail… dont nous avons pu parler ensemble…

– C’est Jean-Pierre qui, tard, vient me récupérer sur le quai quand mon bras n’a pas encore retrouvé sa vitalité…

– C’est Daniel qui me partage ses inquiétudes concernant sa femme qui ne se bouge pas assez !

– C’est Pernes’family qui pare aux aléas quand l’un ou l’autre chauffeur prévu à un empêchement de dernière minute… toujours avec le sourire !!! C’est l’occasion du partage des nouvelles quand je reviens après une absence un peu longue…

A la gare de Montluçon

– c’est Mme « Relay »… qui d’emblée me prépare mon « capuccino »… me donne une poignée de sachet de sucre pour faire mes profiteroles… avec une machine capricieuse : « J’ai beau leur dire… j’attends toujours le réparateur… alors je bricole… des fois avec succès… mais pas toujours ! »… « J’aime bien mon travail… il y a les habitués qui viennent chercher leur journal…ou prendre leur café » avec chacun des bouts de conversations ont lieu…

– Pour passer sur « mon » quai bien des bonnes volontés m’offrent spontanément leur aide… ou répondent, avec le sourire à ma demande… S’il n’y a personne en vue… dans la période où mon bras rechignait à l’effort j’ai fait appel aux employés SNCF : « Pas de problèmes… »

Au guichet : il y a plusieurs employées qui me connaissent non seulement de vue mais connaissent aussi mon nom ! Là aussi petits échanges, avec humour, sur les perspectives peu réjouissantes de la SNCF… A plusieurs reprises alors que « la machine » ne veut pas faire les billets : « vous avez un téléphone ? Dès que ce sera au clair je vous appelle… que vous ne vous dérangiez pas pour rien ! ». Il est arrivé, à plusieurs reprises qu’avec l’une ou l’autre on se rencontre dans un autre contexte que la SNCF : un concert du conservatoire, une promenade dans les petits chemins… chez un commerçant : c’est toujours sympa… Une sortie de l’anonymat qui fait du bien en réciprocité.

–  Dans le trainsouvent au retour, en fin de circuit… discussion avec les contrôleurs, sur leurs déplacements, la polyvalence : tantôt chauffeur, tantôt contrôleur… l’avenir de  nos lignes… les constats sur les problèmes de matériel défectueux… leur avenir avec le passage des lignes au privé… beaucoup d’inquiétude même si tout cela est dit avec beaucoup d’humour de part et d’autre !

Dans les cars TER …là aussi c’est l’occasion de conversation avec le conducteur ou la conductrice, qui ne sont pas des employés SNCF mais du personnel et des cars Kéolis.

  • « Aujourd’hui ils m’ont donné un nouveau car… il faut que je trouve les différentes commandes… » 
  • « Maintenant ce ne sont plus les chefs de gare qui donnent le départ mais un chronomètre sur le téléphone : 5…4…3…2…1…GO !nous sommes fliqués tout le long du parcours… »…. 
  • « Je ne travaille pas à temps complet…. J’étais maçon… j’ai eu un accident… je suis en invalidité partielle… ils (Kéolis) font appel à moi pour dépanner, pour les remplacements… souvent au pied levé ! »
  • « avant j’étais chauffeur poids lourds, mais pas routier, car j’aime rentrer chez moi le soir… j’ai été licencié… maintenant je fais des CDD… ça me va… sur l’année je m’en sors…»

– à Vierzon… arrivée par le car… souterrain… un couple qui en sort… lui : « Vous voulez-de l’aide ? »… « Vous allez sur quel quai ? »… puis il repart. Au moment où le train arrive une voix derrière moi : « je vais monter votre valise »… c’était le même couple accompagné de leur fille… à Paris : « laissez-votre valise je m’en occupe »… je vais au bus… super embouteillage pas moyen de traverser… une voix « décidément on ne se quitte plus !!! » ils étaient derrière moi… ils me doublent… et là je me rend compte que la jeune fille a un certain handicap au niveau de la  marche !!!… belle rencontre, pleine de chaleur !!!

– à Paris… je suis une grande utilisatrice des « bus » !… parfois du métro… s‘il faut monter, j’en sors… mais pour descendre !!! là aussi les aides sont de toutes couleurs et de tous âges !!! Dans les bus j’ai mes places privilégiées soit assise quand cela est possible… soit debout pour bien me « cramponner » et descendre facilement à l’arrêt prévu ! Cela est aussi l’occasion de mini discussions sur les sujets les plus variés : le handicap… l’âge… les démarches… les petits-enfants… les voyages … et aussi le silence.

C’est ainsi que j’ai fait connaissance de Mélanie… qui m’a emmené, spontanément », avec elle, déjeuner dans un restaurant associatif du 3ème : une belle rencontre, et une belle découverte ! « Je vous l’ai proposé… parce que d’emblée il m’a semblé que vous étiez certainement dans ces eaux là  (l’associatif et le solidaire !!!). »

 Au-delà des transports c’est aussi les multiples mini-rencontres qui jalonnent mes déplacements : restauration… achats divers… c’est facilement l’occasion d’une remarque encourageante, souvent avec humour.

Dans tout cela je constate combien nous avons  besoin les uns et les autres de voir les choses avec humour, de pouvoir rire de ce qui nous tombe dessus… mais aussi, à l’occasion, de parler « sérieusement ».

Souvent il m’est arrivé de parler de ce que vivent concrètement et font des jeunes (ACE, TOP ADO, JOC…)… de valoriser les « jeunes »  souvent décriés… de même que d’aller à l’encontre du jugement global sévère : « Aujourd’hui, les gens sont individualistes… » en faisant part de mon expérience concrète !

Toutes ces rencontres donnent « visages », voix, couleurs à mes déplacements… et bien au-delà, habitent ma vie, ma prière : Ils sont ce peuple aimé de Dieu. Ces rencontre sont « sourires », bons moments, au cœur  de la réalité SNCF pénible !!!

« Ah, aujourd’hui… quelles seront les rencontres ?…où suis-je « attendue »… Donne-moi Seigneur l’oreille qui écoute, qui entend, donne-moi la parole apaisante, réconfortante, encourageante, source de joie… ou le silence qui se veut respect… »

« Marche avec nous Jésus ressuscité… »

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Ce qui, dans l’échange en communauté m’a plus spécialement marqué :

– Ces rencontres s’inscrivent dans une démarche « gratuite » en « réciprocité »… chacun peut ou non s’y engager !

– dans ce type de relation nous sommes parfois… voire souvent en décalage, à contre-courant vis à vis des remarques négatives sur les jeunes, sur l’individualisme… ; nous témoignons de ce que nous voyons vivre qui est « autre »… nous ne pouvons laisser « mettre tout le monde dans le même sac » !…  « Je ne te demande pas de les oter du monde mais de les garder du mauvais… » Jn 17,15… être « dans le monde »…mais pas « du monde » !!

 – une relation en réciprocité qui se greffe sur des « manques » de part et d’autre, sur des soifs relationnelles vécues dans une totale liberté… Cela dit une certaine « pauvreté » la leur, la mienne dans une vie où le vécu sur le terrain est limité.

 – Ces temps « morts » des transports… se transforment en lieux, éphémères, d’une « vie partagée » qui donne du bonheur… à la mesure du désir et de l’investissement des deux parties… Il est important d’accueillir ce qui peut s’y vivre…

 

Monique. Petite Sœur de l’Ouvrier.

Mai 2019.

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